Nos piliers de l’éducation presqu’effondrés

- mars 17, 2022

Quelquefois, ma maman m’a dit avoir croisé ma maîtresse d’école à Douala (Capitale économique camerounaise, NDLR), sur la route du marché. Chaque fois, ma maîtresse est très ravie de prendre des nouvelles et de savoir ce que devient son élève. La dernière fois, ma maman n’a pas manqué de prendre son numéro. Je lui ai écrit : 
 
- Bonjour Maîtresse. C’est F…. C’est maman qui m’a envoyé votre numéro. J’espère que vous allez bien ?? Et votre famille aussi ? Ça fait plaisir de pouvoir vous écrire !
 
Et son message a suivi :
 
- Bonjour ! Très heureuse de recevoir ce petit mot. Ça va assez bien pour le moment et toi, la vie dose ? 
 
Converser avec sa maîtresse une vingtaine d’années plus tard, ça fait chaud au cœur quand on sait le rôle qu'elle a joué dans la fondation de notre éducation. 
 
Ma maîtresse m’a dit aller « assez bien pour le moment ». Mais combien de maîtres, de maîtresses, d’enseignants, d’enseignantes, ne vont pas bien depuis longtemps ? 
 
Leur mouvement s’est créé : #OTS (On a Trop Supporté). Sur la toile, on en parle. Voilà quatre semaines que les enseignants sont en grève au Cameroun, soutenus ici et là par des élèves. Même les plus jeunes ont conscience que ce n’est pas une situation tolérable. Bon sang ! Va-t-on aller jusqu’à risquer l’année blanche ?
 
Enseignant, enseignante, chacun et chacune se mobilisent pour interpeller. Des vidéos d’appels à l’aide sont enregistrées. Des histoires différentes, avec la même trame : affectation au loin, sans intégration, sans salaire, depuis des années. Ces hommes et femmes qui ont des familles à nourrir vivent d’aumône alors qu’ils se tuent à la tâche pour instruire les enfants de ceux et celles qui laissent parfois la nourriture pourrir. Des enfants qui deviendront peut-être ministres. 
 
 
La semaine dernière, c’est l’histoire de Hamidou, enseignant d’Education physique et sportive (EPS) dans la localité de Beka qui a ému plus d’un. Il y a encore quelques jours, sa vidéo faisait le tour des inbox. Debout, ses paroles chargées d’émotion. A côté, un montage photos d’avant et d’après permettant d’évaluer le nombre considérable de kilos perdus depuis l’obtention de son diplôme, soit depuis son affectation. A peine son désespoir crié, il est décédé. Quelques jours plus tard, le montage a changé. Désormais, on le voit costaud, fort, imposant, avant d’être enseignant ; amaigri, fatigué, désespéré, étant enseignant. Et puis, cette dernière image venue nous bouleverser : Hamidou, enveloppé dans un linceul et porté par ses collègues pour sa mise en terre. Voilà le résultat de dix (10) ans sans salaire. Difficile de manger, impossible de se soigner. 
 
Alors que les femmes célébraient leurs droits, l’épouse de Hamidou pleurait son mari parti à 40 ans le 08 mars 2022. Et aujourd’hui, que va-t-on faire ? Donner à Hamidou une médaille à titre posthume ?? Donner une enveloppe à son épouse ?? Tout ça a vraiment un sens ?

J’ai appris que l’ouvrier mérite son salaire. L’apôtre Paul l’a rappelé dans sa lettre à son jeune élève Timothée. Tant de textes anciens et nouveaux disent de ne point opprimer son prochain ; de ne point retenir le salaire du travailleur, le gain du pauvre. Où sont les salaires des enseignants ? Il y a aussi probablement des infirmiers, des pharmaciens, des journalistes, des informaticiens, etc. Dans chaque secteur, si on va bien regarder, il y a des salaires qui disparaissent. Ici, comme ailleurs en Afrique et dans le monde. Mais aujourd’hui, on crie pour les enseignants, ces piliers de notre éducation malheureusement oubliés. 
 
Souvenez-vous, pour exercer les métiers sus-cités, et bien d’autres non-cités, il faut passer par la maîtresse, par l’enseignant. Du primaire au secondaire, ils sont indispensables, et c’est la base. 
 
Honorons leur travail, en respectant leurs droits ! Ce n’est pas une faveur, mais une obligation.
 
Clap ou clac !
 
Feel Maria

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